Article de Henri Smets membre de l'Académie de l'Eau (France)
Décembre 2020
Rendre l’eau abordable pour les personnes démunies
La légalisation récente de la tarification sociale de l’eau de l’eau permet dorénavant de modifier les tarifs de l’eau de façon à réduire le prix de l’eau pour les personnes démunies.
La présente étude analyse différents systèmes de tarification destinés à rendre l’eau plus abordable dans le cas des collectivités où le prix de l’eau et de l’assainissement est élevé.
Blog HUFFPOST du 9 juillet 2020 - Actualités:
https://www.huffingtonpost.fr/entry/apres-le-coronavirus-la-prochaine-crise-mondiale-pourrait-etre-la-guerre-de-leau_fr_5f072fd8c5b6480493ccaa3c
Si l'on néglige la crise de l’eau et ses émeutes, ce sont de futures guerres de la faim qui auront lieu dans les états en situation de pénurie.
Le manque d’eau dans la majorité des campements et des bidonvilles en France est reconnu et a été sanctionné par un nombre croissant de tribunaux administratifs. Les collectivités territoriales sont désormais tenues d’intervenir seules ou avec le concours de l’Etat pour que le droit à l’eau et à l’assainissement soit respecté même dans le cas des campements et autres logements précaires. Dans quelques cas récents, le droit à l’eau n’a curieusement pas été retenu par les tribunaux saisis.
Henri Smets est membre de l'Académie de l'Eau
Il est un spécialiste reconnu des questions du Droit à l'eau. Il a publié de nombreuses études qui ont inspiré le législateur français et les acteurs économiques en matière d'eau potable et d'assainissement en particulier pour les populations défavorisées en France.
Résumé de l'étude
Le Protocole sur l’eau et la santé (CEE) que la France a ratifié en 2006 contient l’engagement des Etats de prendre « toutes les mesures appropriées pour assurer un assainissement adéquat d’une qualité propre à permettre de protéger suffisamment la santé de l’homme et l’environnement ». Ce texte implique l’obligation de disposer de toilettes avec évacuation hygiénique des excréments, obligation qui est déjà très largement satisfaite en France.
Néanmoins, on observe que des personnes prises d’un besoin pressant hors du domicile se trouvent embarrassées de ne pas avoir accès à des toilettes dans leur voisinage. D’autre part, il reste encore de nombreux ménages sans toilettes dans leur logement ou même sans logement. Pour apporter un remède à ces situations, il conviendrait d’augmenter le nombre de toilettes disponibles et, en particulier, le nombre de toilettes publiques dans les collectivités où celles-ci sont rares.
L’accès à des toilettes a fait l’objet depuis de longues années de nombreuses dispositions dans le cadre des lois sur le logement, sur le travail et sur la santé. En particulier, la législation sanitaire prévoit que les établissements recevant du public (ERP) doivent disposer de toilettes « en nombre suffisant ». Cette législation pourrait recevoir une application plus complète si le nombre suffisant était mieux défini et si les obligations des ERP en matière de toilettes étaient précisées. Les manquements à l’hygiène dans les toilettes scolaires devraient être corrigés sans délai. La question des toilettes ne doit pas rester dans l’ombre.
ette étude a été réalisée par Henri Smets , membre de l'Académie de l'Eau
« Chroniques et opinions. Tour d’horizon des instruments de mise en œuvre de la directive-cadre sur l’eau ». Philippe MARC, Avocat à la Cour, Docteur en droit et Claude MIQUEU, Président de la commission Réglementation du Comité National de l’Eau (CNE), Président de la commission de planification du Comité de bassin Adour-Garonne, Docteur en droit.
Tous deux sont membres du Collège des Personnaliéts qualifiées de l'Académie de l'Eau.
A consulter: Droit de l’Environnement n° 288 Avril 2020.
Deux études de Henri Smets de l’Académie de l’Eau, France
Des chèques eau pour les plus démunis Version mise à jour en janvier 2019
Résumé :
Pour mettre en œuvre l’Objectif du développement durable : 6.1 « Assurer l’accès universel et équitable à l’eau potable à un coût « abordable », on peut faire appel à un système d’aides préventives calqué sur le système utilisé en matière de chèques énergie et aider ainsi les usagers ayant de faibles ressources à payer leur eau sans engendrer des coûts de gestion élevés.
Le coût des chèques eau Février 2019
Résumé :
Des chèques eau pourraient être attribués à près de 360 000 ménages démunis pour les aider à payer leur eau entrainant une dépense totale de 24 M€/an ou 0.37 € par habitant s’ils étaient disponibles dans toutes les collectivités territoriales. Dans le cas d’un couple très démuni, le montant des chèques eau devrait dépasser environ 80 €/an. L’incidence des chèques eau sur le prix de l’eau sera très faible, même si ces chèques ne sont utilisés que dans les seules collectivités volontaires.
Cet ouvrage porte sur l'évaluation des aides pour la prise en charge partielle des factures d’eau potable et d’assainissement des ménages en situation de précarité et comparaison des divers moyens d’assurer le financement de ces aides en France.
Résumé (extraits de l'ouvrage à paraitre aux éditions Johanet)
En France, la loi prescrit que chacun a droit à de l’eau potable à un prix abordable
mais ne définit pas ce qu’est un prix abordable et ne précise pas quel organisme est chargé de faire en sorte que le prix payé soit effectivement abordable. La situation réelle est peu satisfaisante puisque plus d’un million de ménages n’ont accès à l’eau qu’à un prix généralement considéré comme étant excessif pour eux. Tous les responsables sont conscients de cette situation mais ne s’accordent pas pour prendre les mesures nécessaires pour résoudre ce problème social. Plusieurs lois très utiles ont été adoptées mais aucune ne va assez loin.
Cet ouvrage porte sur la mise en oeuvre de solutions destinées à rendre l’eau abordable pour les plus démunis dans le contexte français. Il identifie les bénéficiaires d’aides destinées à réduire la charge financière de l’eau et montre que ceux-ci appartiennent pour l’essentiel à la catégorie des titulaires du RSA Socle. Elle prend en compte le fait qu’il existe dans le pays un consensus pour considérer que le prix de l’eau est inabordable lorsque la facture d’eau et d’assainissement dépasse 3% des revenus effectifs du ménage. Une réduction tarifaire ou une aide portant sur une partie de la facture d’eau permettrait de rendre la dépense d’eau plus supportable. Globalement, il faudrait consacrer à cette question environ 50 M€ sur l’ensemble des dépenses d’eau et d’assainissement (10 000 M€/an HT).
Si l’évaluation des besoins d’aide ne pose pas de réels problèmes, il n’en est pas de
même lorsqu’il faut identifier qui couvrira la dépense de solidarité pour l’eau que ce soit sous la forme d’une réduction tarifaire ou d’aides préventives. Huit lois et propositions de lois concernant le financement des aides pour l’eau sont examinées et comparées.
On analyse aussi des suggestions de la société civile. En pratique, la tendance dominante a été de faire appel à la bonne volonté des uns et des autres mais sans créer d’obligations au niveau national. Certaines municipalités et certains délégataires ont créé volontairement des tarifs sociaux et ont distribué des aides préventives. Dans quelques cas, ils sont même venus en aide à 10% de la population desservie.
Pour faciliter la généralisation de ces initiatives, il faudrait définir les solutions acceptables pour le financement des aides et rendre ces financements aussi pérennes que possible.
Cette étude identifie différentes options qui répondent à l’objectif d’aider les plus
démunis mais sans augmenter le prix moyen de l’eau des ménages et sans créer de nouvelles taxes. La tarification différenciée mise en place par quelques municipalités présente de grands avantages. Depuis peu, les municipalités ont été autorisées à subventionner les services d’eau pour mener une politique tarifaire sociale. Cette aide pour l’eau pourrait être financée au niveau local ou en augmentant certaines taxes existantes comme celle sur les prélèvements d’eau au sein des agences de l’eau ou celle sur les eaux embouteillées mais dans ces deux cas, il faudrait adopter une disposition législative à cet effet.
Les expériences françaises et étrangères montrent que dans un pays développé, le prix de l’eau peut être abordable pour tous à condition d’introduire des mesures particulières de solidarité au bénéfice des plus démunis. Dans le contexte français, l’initiative devra venir des municipalités, le législateur ayant mis en place récemment les instruments adaptés.
En conclusion, il est parfaitement possible de mettre en oeuvre en France le droit à l’eau sans engendrer des difficultés particulières au plan financier et sans dépendre de l’adoption deour y parvenir, il faudrait faire appel à plusieurs approches différentes et non à une approche nationale unique.
Observations sur la proposition de Loi visant à la mise en œuvre effective du Droit humain à l’eau potable et à l’assainissement (PPL N°1375), présentées par l’Académie de l’Eau au Rapporteur M. Michel Lesage, Député. Avril 2014
Le 20 mai 2016, 20ème anniversaire de la création de l’Académie de l’Eau. Cette manifestation marquait aussi le centenaire de la naissance du Professeur Jean Dausset, Prix Nobel de Médecine, fondateur de l’Académie de l’Eau. Cette journée a été l’occasion de communications de haut niveau, suivies de débats, sur le thème ?Eau et biodiversité dans le changement climatique?.
Cet événement exceptionnel qui a rassemblé plus de 120 participants, français ou étrangers, s’est déroulé en partenariat avec l’Académie des Sciences d’Outre-Mer, dans les locaux prestigieux de cette institution rue La Pérouse.
Les Présidents de ces deux Académies, MM. Philippe Bonnichon et Serge Lepeltier, ont présidé la journée, avec l’appui de M. Pierre Gény, Secrétaire perpétuel de l’AcSOM et de M. Jean-Louis Oliver, Secrétaire Général de l’AcE.
Les représentants des Académies des Sciences, de l’Agriculture, de la Marine, de Médecine, de Pharmacie, et des Technologies ainsi que de l’Ethique ont participé à ce 20ème anniversaire et y ont délivré des messages de sympathie.
On trouvera ci-joint le programme, la liste des intervenants, français ou étrangers, et les éléments relatifs aux diverses interventions
"Le recouvrement des factures d’eau , Henri Smets de l’l’Académie de l’Eau, Préface de François Brottes, ancien Président de la Commission des Affaires économiques de l’Assemblée nationale. "
Cet ouvrage de 271 pages publié par les Editions Johanet en juin 2016 décrit l’évolution depuis 2007 de l’interdiction des coupures d’eau en cas d’impayés et des moyens de remédier aux impayés qui en résultent.
Editions Johanet
Au plan international, la France a reconnu le droit à l’eau potable et à l’assainissement comme un droit fondamental et au plan interne, elle a adopté plusieurs lois mettant en oeuvre certains éléments de ce droit. Elle a notamment institué le droit à un prix abordable et le droit à une aide pour l’eau des personnes démunies. Toutefois, il faut admettre que plusieurs années après leur proclamation, ces droits ne sont ni effectifs, ni opposables. Le droit à l’eau potable et à l’assainissement est en vigueur dans certaines villes françaises, mais pas dans d’autres. A cet égard, la Commission nationale consultative des droits de l’homme (CNCDH) a estimé que « les lois adoptées ces dernières années ne suffisent pas à donner toute son effectivité au droit à l’eau, en particulier pour les personnes qui vivent dans des situations précaires ou se trouvent malgré elles dans des situations illégales »1. La solution à ce problème a été proposée par le Conseil d’Etat lorsqu’il a recommandé « à chaque Etat d’inscrire ce droit dans le texte interne jugé le plus approprié (Constitution, loi ordinaire) pour en définir la portée et le contenu ». L’Académie de l’Eau considère que le droit de l’homme à l’eau potable et à l’assainissement devrait être inscrit en France dans une loi destinée à le rendre effectif et opposable. Cette loi devrait contenir des dispositions qui manquent encore en Droit français pour que le droit à l’eau potable et à l’assainissement devienne effectif. Dans cette perspective, l’Académie a élaboré des propositions de dispositions législatives destinées à préciser ou compléter les dispositions existantes et à garantir que le droit à l’eau potable et à l’assainissement est un droit de l’homme opposable dans le cadre français2. Ces propositions sont résumées dans les dispositions données en Annexe. Elles sont soumises à l’attention des élus pour qu’ils prennent les initiatives qu’ils jugeront nécessaires. Les propositions de l’Académie de l’Eau ont été présentées à la Commission nationale consultative des droits de l’homme qui les ont transmises au Premier Ministre. Les principales propositions mises à jour au regard des dernières avancées législatives3 sont données ci-après
Publié en 2004 par l'Harmatan Paris. La Charte sociale de l’eau expose que “L’eau est un bien économique et social car, si chacun doit en supporter le coût, la solidarité entre riches et pauvres doit s’y substituer pour les plus démunis.”
Selon M. Pierre-Alain Roche, il faut “organiser une prise en charge des dépenses par un système de participation solidaire permettant à chaque catégorie d’apporter une contribution à sa mesure, y compris en nature”. Cette contribution vise à la répartition des coûts de l’eau potable entre tous pour que chacun puisse bénéficier de l’eau. Pour M. Jean Dausset, ancien Président de l’Académie de l’eau, les distributeurs d’eau devraient prendre en charge l’eau des pauvres par une surtaxe sur les factures d’eau, ce qui aboutit à un prix normal et un prix réduit pour les personnes ayant de très faibles ressources. Pour M. François Valiron, Secrétaire général de l’Académie, un fonds spécial financé par les distributeurs devrait prendre automatiquement en charge le paiement des factures d’eau des plus démunis. En novembre 2001, l’Académie de l’eau a examiné le problème de la solidaritéet, réunie en Assemblée générale, adressé aux autorités françaises le vœu que “ la société civile française contribue plus activement aux actions destinées à financer l’approvisionnement en eau des populations les plus démunies” et qu’ ”une plus grande priorité soit donnée à l’aide internationale destinée à améliorer l’approvisionnement en eau des populations rurales des pays en développement.”
La solidarité exposée dans la Charte est présentée comme étant une obligation et pas simplement comme une possibilité envisageable dont la mise en œuvre reste hypothétique. Elle résulte du fait que le droit à l’eau est désormais reconnu comme étant un droit fondamental. Cette approche du problème de l’accès à l’eau pour tous est conforme à de multiples déclarations officielles qui insistent sur le besoin de tenir compte des aspects sociaux et des besoins des plus démunis dans la tarification de l’eau. Le Groupe de travail “Eau” du Comité français pour le Sommet mondial du développement durable a exposé en juin 2002 que “ Compte tenu de l’inégale répartition des ressources, des revenus, des populations, l’accès à l’eau et à l’assainissement requiert des mécanismes de solidarité locale, nationale et internationale”.
La répartition des coûts de l’eau potable peut avoir une dimension géographique (péréquation entre villes et campagnes, entre habitants raccordés et nouveaux habitants), sociale (péréquation entre riches et pauvres) ou économique (péréquation entre gros et petits consommateurs, entre consommateurs domestiques et autres). Elle peut faire intervenir des considérations telles que l’équité, l’efficacité économique, l’obligation d’assistance à son prochain, la capacité et la volonté de payer des usagers et des contribuables. Elle vise à la mise en œuvre du principe de solidarité au sein de la collectivité qui utilise le service de l’eau ou d’une collectivité plus large. Cette solidarité fait intervenir les consommateurs d’eau et les contribuables car le prix de l’eau est traditionnellement pris en charge à la fois par les usagers et par les contribuables. Selon cette approche, les usagers de l’eau potable et les contribuables sont collectivement responsables de sa distribution à tous par un service de l’eau, monopole naturel sur lequel ils exercent leur contrôle. Cette responsabilité collective implique un financement collectif sans qu’il soit impératif de tarifer l’eau selon le principe d’un prix unitaire identique pour tous ou du prix qui correspond aux dépenses consenties dans chaque cas.
Ce rapport présente plusieurs raisons pour lesquelles le droit à l’eau, c’est-à-dire le droit à l’accès à l’eau potable et à l’assainissement pour tous, pourrait ne pas être reconnu officiellement et examine les conséquences éventuelles qu’impliquerait la reconnaissance de ce droit principalement dans les pays développés. Il présente
différents arguments invoqués contre le droit à l’eau, en évalue la pertinence et la portée et fait des suggestions sur les moyens de surmonter ou de contourner certaines difficultés. Il conclut qu’il n’y a pas d’obstacles sérieux à reconnaître un droit aussi essentiel pour chaque citoyen.
This report outlines a number of reasons for which the right to water, i.e. the right of access to drinking water and sanitation for all, should not be officially recognized and examines the possible consequences which would arise if such a right was recognized in developed countries mainly. It outlines various arguments against the right to water, assesses their validity and makes suggestions on means to overcome them. The conclusion is that there are no serious obstacles to recognize a right which is so essential for each citizen.