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Le droit à l’eau potable et à l’assainissement, sa mise en oeuvre en Europe.Sous la direction de H. Smets. 2011. Préface de Marc-Gentilini Président de l’Académie de l’Eau

Ouvrage réalisé avec le soutien de la Coalition Eau qui regroupe 31 ONG dans le seceur de l’Eau en France.
Préface du Professeur M.Gentilini

Il a fallu dix ans de débats pour que le droit à l?eau potable et à l?assainissement soit reconnu par les instances internationales au rang des Droits de l‘Homme. En Europe, des traités ont été adoptés au plan régional et mis en oeuvre pour rendre obligatoire l‘accès de tous à l‘eau potable et à l‘assainissement. Des Gouvernements européens ont été condamnés par des tribunaux pour non-respect de ce droit élémentaire, pour fourniture d‘une eau non potable, pour absence d‘assainissement et pour atteinte à la dignité. Un logement sans eau, sans douche ou sans toilette est un « logement indigne » en France et ne peut plus être mis en location.

En pratique, tous les pays européens fournissent d‘ores et déjà l‘accès à l‘eau potable à la grande majorité des habitants des villes où l‘eau peut y être consommée sans risque. Les épidémies liées à l‘eau ont quasiment disparu. Et les villes sans égout sont de plus en plus rares. Des investissements considérables ont dû être effectués pour que chacun puisse vivre dans un environnement sain.

L‘Europe a déjà mis en place la plupart des équipements nécessaires pour garantir l‘accès à l‘eau potable et à l‘assainissement et a les moyens financiers pour rendre accessible à tous l‘eau potable et l‘assainissement. Même si la mise en oeuvre du droit à l?eau n‘est pas parfaite, elle rencontre assez peu d‘obstacles économiques dans la plupart des pays.

Malheureusement, tous les Européens ne bénéficient pas des mêmes conditions d‘accès à l‘eau ; des discriminations subsistent çà et là aux plans géographique, ethnique, économique, etc. Cette minorité privée de ce droit représente cependant plusieurs dizaines de millions de citoyens, notamment en Europe orientale, qui boivent une eau insalubre, mettent en péril leur santé et ne bénéficient pas de toilettes appropriées.

Dans ces pays, les conditions de vie en zone rurale ont peu évolué quand elles n‘ont pas régressé et dans trop de villages, il n‘y a ni eau potable, ni assainissement.

Il reste donc de gros efforts à faire en faveur des ruraux. Les habitants des zones privilégiées majoritaires en Europe, devront faire preuve de plus de solidarité pour aider les ruraux à rattraper rapidement le retard accumulé.

Comme les services de l‘eau et de l‘assainissement sont des services payants, il faudra vérifier que leur prix ne constitue pas un obstacle économique au détriment des plus pauvres, une minorité qui ne peut pas payer son eau. En effet, l‘eau est devenue un droit, et n‘est plus seulement un bien ou un service à la disposition des plus aisés.

Mettre en oeuvre le droit à l‘eau potable et à l‘assainissement dans chaque pays européen implique une action résolue des Parlements sur un sujet qui ne concerne, certes, qu‘une minorité pour laquelle il faudra cependant, le plus souvent, légiférer afin qu‘elle soit prise en compte avec de nouvelles dispositions pour installer des mécanismes de solidarité de financement envers les plus défavorisés.

Soucieux de traiter de l‘effectivité du droit à l‘eau et à l‘assainissement, l’Académie de l’Eau a chargé l‘un de ses membres, Henri Smets, expert reconnu, de réunir un ensemble de contributions pour montrer comment ce droit a été mis en oeuvre dans les pays européens et en particulier, en France. Les rapports ne se contentent pas de promouvoir un nouveau droit, ils mettent en évidence les démarches à entreprendre pour corriger les imperfections actuelles, détaillent les législations nationales et cherchent à en signaler les carences.

Au plan mondial, il ne faut pas se bercer d‘illusions : le droit à l?eau potable et à l?assainissement a été affirmé par l‘ONU, mais dans de nombreux pays européens, il n‘est pas reconnu en droit positif au plan interne. Quand il est juridiquement reconnu, son contenu est souvent vague ; ainsi, peu de pays ont interdit au distributeur de priver d‘eau et de toilettes, les ménages pauvres en cas d‘impayés et il a fallu y associer des dispositifs sociaux complémentaires.

Mettre en oeuvre le droit à l‘eau consiste à agir de sorte que chacun acquiert et conserve son accès à l‘eau potable et à l‘assainissement pendant toute sa vie. Pour y parvenir, des dispositions législatives protégeant l‘individu et organisant la solidarité doivent être adoptées.

Affirmer un droit ne sert à rien, s‘il n‘est pas précisé qui satisfera la demande et qui en payera le prix. Il faut donner l‘eau à celui qui a soif comme on donne le pain à celui qui a faim et un vêtement à celui qui a froid. L‘eau est un bien essentiel auquel chacun a droit. La générosité doit suppléer l‘état de précarité.

L’Académie de l’Eau en publiant ce livre avec Henri Smets espère contribuer à l‘adoption rapide de solutions pour que l‘appel au droit à l?eau et à l?assainissement se concrétise partout et pour tous.

Professeur Marc Gentilini

Président de l‘Académie de l‘Eau

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